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Colca gla gla

Mardi 22 Mai, Cabanaconde

Avant de nous coucher hier soir, nous avons fait une razzia sur les lits inoccupés de la chambre (ça tombe bien, nous en avons cinq au total !) pour les dépouiller de leurs couvertures et les empiler sur le petit lit que nous nous partageons pour avoir plus chaud. Malgré leurs motifs des plus kitsch aux couleurs de Tic et Tac, Bambi et autres nounours, les couvertures semblaient épaisses et de nature à nous permettre de supporter la nuit qui s’annonçait glaciale. Hélas, le courant d’air arrivant par la porte non jointive et par l’ouverture sans fenêtre de la salle de bain s’est avéré plus coriace que les couvertures et c’est donc pas vraiment réchauffés que nous nous réveillons ce matin dans une chambre où notre fidèle thermomètre indique une température de dix petits degrés. Nous sommes ici comme en Chine surpris par l’aptitude des habitants à supporter un climat rigoureux dont ils ne font rien pour se protéger : en Chine, c’était notre logeuse et toute sa famille qui regardaient tranquillement la télévision en plein air le soir dans la cour malgré le temps plus qu’hivernal, ici ce sont les courants d’air et les portes jamais fermées laissant entrer le froid du dehors.

Nous filons nous réchauffer en marchant jusqu’à un petit mirador à la sortie du village, découvrant enfin le paysage juste entraperçu hier lors de notre arrivée nocturne. Cabanaconde est blotti entre les collines tissées de cultures en terrasse formant de jolis damiers, et surmonté par les fiers pics enneigés de la cordilière. Le spectacle du village au petit matin est magnifique : des dames en costume traditionnel ramassent le maïs dans les champs tandis que les hommes mènent des convois de petits ânes au poil dru à travers les rues de terre battue pour rapporter la précieuse récolte. Nous nous perdons un peu entre sentiers barrés et terrasses avant d’atteindre ce qui nous semble être le mirador convoité et de rester le souffle coupé devant la vue qui s’offre à nous. Devant nous... le vide sur quelques centaines de mètres ! Une crevasse immense se tortillant paresseusement à travers la montagne et nous donnant le vertige par ses pentes abruptes semblant taillées dans la roche. C’est à peine si on distingue le fond, caché dans l’ombre, tandis qu’en y regardant de plus près, on découvre d’improbables petits villages blottis le long des pentes et accessibles par de petits sentiers à flanc de montagne. Le paysage est vraiment grandiose et nous ne regrettons plus une seconde le long trajet jusqu’ici et la nuit inconfortable : après tout, des endroits pareils cela se mérite. Nous continuons la promenade par un petit tour le long des rues du village, encore typique de la campagne péruvienne. Les maisons sont solides, en pierres, alignées le long de rues étroites où nous croisons hommes et femmes vêtus de costumes colorés, troupeaux de chèvres ou ânes menés à la queue leu leu. Nous ne savons trop où déjeuner dans ce village quasi dépourvu de toute infrastructure touristique et décidons de tester une petite gargote locale. Bien sûr, la patronne et ses quelques clients semblent fort surpris de l’arrivée de deux gringos mais, une fois confirmé que nous voulons bien déjeûner (nous ne savons pas quel est le menu mais sommes prêts à tenter notre chance), la tenancière s’empresse de nous dresser une table, nous sourit et file en cuisine préparer notre repas. Nous nous régalons finalement d’une soupe très copieuse et nourrissante, suivie d’un non moins copieux plat de viande sautée avec des légumes. C’est bon, c’est typique et bien loin des restaurants à touristes de Arequipa et en plus ridiculement pas cher puisque nous nous en tirons pour moins de 2 euros pour deux.

Nous ne nous sentons pas le courage d’effectuer le trek local, à savoir la descente au fond du canyon, ça, facile, puis, beaucoup moins facile, après une courte marche tout au fond, la remontée vers le sommet, de préférence sous le soleil de midi puisque l’ensemble prend quelques heures. Comme nous voulons quand même avoir le loisir d’admirer le paysage, nous choisissons la version spécial flemmards et décidons de ne descendre qu’une petite partie du sentier, suffisante pour admirer la vue sans s’épuiser ensuite à trop remonter. Une fois de plus, nous partons à travers champs, admirant le système de cultures ancestral hérité des incas, des terrasses savamment disposées à flanc de colline, bordées de murs de pierres empilées et façonnant le flanc des montagnes. Nous nous perdons un peu au hasard des sentiers et des croisements avant d’attaquer la vertigineuse descente au fond du canyon. Nous ne croisons personne si ce n’est quelques rares habitants parfois accompagnés de leur âne lourdement chargé et profitons de ce paysage grandiose en toute quiétude. Le sentier qui zigzague sur la paroi du canyon est impressionnant et, bien qu’il soit bien tracé, mieux vaut ne pas avoir le vertige. Le plus impressionnant est ce réseau complexe de sentiers qui relient les villages perchés sur chaque paroi du canyon, nous nous demandons comment font leurs habitants pour vivre dans un endroit aussi hostile. Nous ne croisons pas le célèbre habitant des lieux, le condor, mais sommes enchantés des magnifiques vues découvertes au hasard des lacets.

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