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La drole de ville de M. Eiffel
Samedi 12 Mai, Arica
Nous avons enfin pu dormir un peu apres un changement de bus imprevu a Calama et malgre l’atmosphere tropicale dans notre nouveau moyen de transport dont le chauffage a apparemment ete pousse a fond. Nous arrivons un peu ensommeilles au petit matin a Arica ou nous sommes agreablement accueillis par une employee de l’agence avec qui nous avons reserve un tour de trois jours au parc Lauca demain. Ce parc etant tres difficile d’acces par les moyens de transport locaux, nous avons pour une fois renonce a notre independance et nous sommes inscrits pour une excursion en petit groupe qui semblait plutot bien organisee. Du coup nous avons le droit de loger dans leur hotel de luxe sur la plage pour un tarif special clients defiant toute concurrence. L’employee nous apprend que l’hotel n’est qu’a quelques minutes a pieds et que notre chambre nous y attend, chic nous allons pouvoir prendre une douche et finir notre nuit. Notre premiere impression d’Arica est plutot etrange : alors que notre guide vantait cette station balneaire du nord Chili au climat agreable toute l’annee et a l’immense plage de sable, nous trouvons une ville plongee dans une brume epaisse sous un ciel uniformement gris. Quant a la plage, elle est certes immense mais totalement deserte, des kilometres de sable s’etendant a perte de vue avec quelques hauts immeubles de ci de la. Moi qui m’etais prise a rever de bronzette apres notre sejour dans les montagnes, me voici fort decue. L’hotel est lui aussi totalement desert (manifestement ce n’est pas la saison touristique !) et nous heritons d’une magnifique chambre, immense, avec une grande terrasse vue mer. Si le soleil daignait se montrer, ce serait parfait !
Revigores par une bonne douche, nous partons a la decouverte de la ville en suivant l’avenue qui longe le bord de mer. Decidement, Arica ne ressemble pas aux autres villes du Chili que nous connaissons : les immeubles du bord de mer sont plutot miteux, la ville semble pauvre et la rue grouille de petits marches improvises ou l’on tente de nous vendre quelques babioles... peut etre est-ce l’influence du Perou voisin ? Pourtant la ville fut prospere a l’epoque du boom du salpetre, ce minerai necessaire a la fabrication entre autres des engrais et de la poudre a canon et que tout le monde s’arrachait. Arica en a garde d’etranges batiments surranes datant du temps ou sa richesse lui permettait de s’offrir les services d’un ingenieur repute, un certain Monsieur Eiffel ! C’est tout d’abord cette drole de cathedrale qui semble un jouet pour enfant construit en mecano. Ici pas d’arcs gothiques ni de portail de pierre imposant, la cathedrale est un petit batiment creme et rouge entierement en metal, pas etonnant quand on pense qu’elle fut construite par Eiffel mais cela detonne un peu au milieu de cette ville sud americaine. Un peu plus loin, nous decouvrons la seconde oeuvre du celebre francais, le batiment des douanes, cette fois construit en briques apportees de France par bateau et portant le poincon des ateliers Eiffel. La derniere fierte de la ville est sa gare ferroviaire qui a elle aussi connu des jours meilleurs mais a garde son style monumental. Le chemin de fer Arica - La Paz reliant le Chili a la Bolivie a travers les hauteurs de l’altiplano fut autrefois une merveille de technologie admiree et celebree mais connait maintenant le triste sort d’etre abandonne faute de rentabilite. L’hotel de luxe qui fut construit a la meme epoque pour accueillir entre autres les riches passagers du train a depuis longtemps ete detruit. Nous flanons un peu dans les rues de la ville mais avons vite fait le tour du quartier commercant et rentrons a l’hotel. Meme si cette ville n’offre pas beaucoup d’attractions, son charme etrange et melancolique commence a agir sur nous et nous revons a sa splendeur passee et au temps ou ces regions maintenant delaissees abritaient des fortunes ignorees.
Nous terminons la journee par un tour sur la plage jusqu’a la station balneaire toute proche, tout aussi deserte que les environs. La seule animation est apportee par les cormorans qui nichent par dizaines dans les palmiers bordant notre hotel, offrant l’etrange spectacle de grappes d’oiseaux perches dans les branches en lieu et place des noix de coco. La plage n’est quant a elle qu’une immense etendue de sable deserte battue par les rouleaux du Pacifique et sans le moindre baigneur a l’horizon. Les restaurants et commerces de Chinchorro, la station balneaire, sont tous fermes en cet automne. Nous commencons a nous demander ou nous allons pouvoir manger ce soir et partons dans le quartier du terminal de bus a la recherche d’un magasin ouvert. Helas, ce quartier est tout autant desole a part sa foule de rabatteurs tentant de nous vendre des tickets de bus et l’armada de taxis qui assure une liaison continue avec le Perou tout proche. Le centre commercial voisin est soit encore en construction, soit deja ferme, en tous cas ce n’est pas la que nous trouverons notre bonheur. Nous faisons le tour des environs et trouvons heureusement un grand marche couvert ou nous faisons le plein pour le pique nique du soir : des delicieux avocats chiliens dont nous nous regalons toujours autant, quelques fruits secs, des tomates bien mures et un peu de pain, c’est parfait. Il ne nous reste plus qu’a nous coucher tot avant de partir demain matin a l’assaut des hauteurs de l’altiplano.
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